Pour l’opinion publique, le terrorisme islamiste en Afrique de l’ouest – Sahara, Sahel et région du lac Tchad – est essentiellement associé à deux organisations :
- Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) dans l’espace saharo-sahélien et,
- Boko Haram dans la région du lac Tchad.
La réalité est un peu différente. Les groupes actifs dans ces deux espaces sont plus nombreux. Ils sont aussi en recomposition quasi permanente. Voici un état des lieux valide pour la fin 2017. Les données sont issues du Country Report on Terrorism 2017, chapitre 5, du Bureau of counterterrorism and countering violent extremism de l’US department of State.
1. Grand Sahara et Sahel
Ansar al-Dine
Groupe malien. Il est désigné organisation terroriste par les autorités US le 22 mars 2013. L’organisation aurait été créée à la fin 2011, après que leur leader, Iyad ag Ghali, ait échoué à prendre le contrôle d’une organisation séculaire touareg.
- Ansar al-Dine fait partie des organisations, qui, avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et le Mouvement pour l’unité et le Djihad en Afrique de l’ouest (MUJAO) ont pris le contrôle de la partie septentrionale du pays, l’Azawag.
- Suite à l’intervention militaire conjointe de l’armée malienne et des forces françaises, le groupe a perdu le contrôle des territoires occupés en 2013. Diverses apparitions vidéo de Ghali en 2015 et 2016 indiquaient qu’il était toujours libre et en vie en 2016.
- Le Front de libération du Macina (FLM) qui apparaît en 2015 lui est rattaché. Le FLM comptait environ 200 hommes en 2016.
- Actif au Mali, Ansar Al-dine a aussi menacé la Mauritanie et la Côte d’Ivoire.
- Depuis sa création le groupe coopère activement avec AQMI. Selon les autorités US, ses moyens sont à la fois issus de cette coopération, de l’envoi de fond de donateurs étrangers et de la participation à des trafics locaux : cigarettes, drogues, armes, trafics d’êtres humains
- En 2017, Ansar al-dine, AQMI, Al-Mourabitoune et le Front de libération du Macina ont fusionné pour former le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jama’at Nustra al-Islam wal-Muslimi).
Al-Murabitoune
Al-Mouribitoune est désignée organisation terroriste par les autorités US le 19 décembre 2013.
- Al- Mourabitoune est née le 22 août 2013, de la fusion du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest (MUJAO), organisation militaire et terroriste salafiste née en 2011 au Mali et des Signataires par le sang, né en décembre 2012. Ces deux organisations sont issues d’une scission d’AQMI. Le leader d’Al-Mourabitoune, Mokhtar Belmokhtar a alors menacé les intérêts occidentaux dans l’espace saharo sahélien.
- Al-Murabitoune opère en Algérie, au Burkina Faso, en Libye au Mali et au Niger. Le nombre de combattants est inconnu.
- Ses financements, au delà d’une aide potentiellement reçue de la part d’autres organisations terroristes qui opèrent sur cette zone, seraient issus de kidnapping et d’autres activités criminelles.
Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI)
Né en Algérie, le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) a été désigné organisation terroriste le 27 mars 2002. Le département d’Etat a amendé le nom de ce groupe en février 2008, après que le GSPC ait officiellement rejoint al-Qaïda en septembre 2006 et se soit désigné sous le nom Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).
- AQMI disposerait d’environ 1000 combattants dans le sahel, répartis entre l’Algérie (sud-ouest, sud-est et quelques partie isolées de la Kabylie), le nord du Mali, le Burkina-Faso, le sud-ouest de la Libye et le Niger.
- AQMI se financerait à travers ses activités de kidnapping et son implication dans des activités criminelles. L’organisation exercerait un fundraising global, mais bénéficierait de peu de soutiens financiers et logistiques en provenance de partisans résidant en Europe.
AQMI, Al-Mourabitoune, Ansar al-Dine et le Front de libération du Macina sont désormais associé au sein du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM).
Groupes terroristes dans la région sahélo-sahérienne en 2017
2. Région du lac Tchad
Boko Haram
Groupe d’origine nigériane, il est désigné organisation terroriste le 14 novembre 2013 par les autorités US. Boko Haram (BH) est responsable de nombreuses attaques dans le nord et le nord-est du Nigéria et dans le bassin du lac Tchad (Niger, Tchad, nord Cameroun). L’insurrection de BH et les ripostes contre-insurrectionnelles sont responsables de milliers de morts depuis 2009 (lien interne vers intervention s extérieures).
En mars 2015, BH a plaidé allégeance à l’EI par le biais d’un message audio. L’EI aurait accepté cinq jours plus tard. BH s’est alors désigné comme l’Etat islamique en Afrique de l’ouest. En septembre 2016, le groupe s’est scindé en deux. La faction dirigée par Abu Musab al-Barnawi conserve la reconnaissance de l’EI. La faction dirigée par l’ancien leader, Abubakar Shekau, qui avait succédé au fondateur Muhammad Yusuf après son exécution extrajudiciaire par les forces armées nigérianes en 2009, s’est quant à elle regroupée dans la forêt de la Sambisa. Elle est située au nord-est du Nigéria, dans la partie sud-ouest du Parc national du bassin du Tchad, à environ 60 km de Maiduguri, berceau de la secte, dans l’Etat du Borno, au Nigéria.
- En 2017, les deux factions regroupent toujours plusieurs milliers de combattants avec des ordres de grandeur qui changent selon les sources.
- Boko Haram, puis les deux branches issues de la scission de septembre 2016, s’autofinanceraient essentiellement en recourant à des activités criminelles : braquages de banques, extorsions et pillages, kidnapping et rançons.
Ansaru
Organisation désignée terroriste par les autorités US le 14 novembre 2013, Ansaru (Jama’atu ansarul muslimina fi baladis-sudan – Avant garde pour la protection des Musulmans en Afrique noire) est née d’une scission avec BH en janvier 2012, après que BH ait tué un nombre important de musulmans.
- Sa structure de direction est peu connue, bien que Khalid al-Barnawi y ait tenu une position importante avant sa capture par l’armée nigériane en 2016.
- Ansaru opère au nord du Nigéria. Depuis 2014, ce groupe n’avait pas été à l’origine d’attaques. Estimés très inférieurs à ceux de BH, ses effectifs sont inconnus. Ses sources de financement restent inconnues des autorités US.
Groupes terroristes dans la région du lac Tchad en 2017